Ascension au sommet avec Orianne Aymard Himalayiste
Rencontre avec Orianne Aymard, Himalayiste, diplomate, humanitaire, chercheuse et écrivaine (oui rien que ça…)
Nous avons eu la chance de recevoir Orianne en décembre dernier chez Enoa (cabinet de recrutement & conseil RH).
Une rencontre singulière, riche d’échanges, d’émotions, où elle nous a livré en toute simplicité son parcours hors norme… L’occasion également de nous présenter et dédicacer son livre : “Sous l’œil de la Déesse” (que nous vous recommandons vivement) où Oriane relate son incroyable ascension du Lhotse (8,516m – sommet satellite de l’Everest et 4e plus haut sommet au monde) et explique les raisons qui lui ont donné envie de grimper si haut !
Une histoire que nous souhaitons aujourd’hui vous partager.
Bonjour Orianne, peux-tu te présenter en quelques mots ? Ton parcours et les raisons qui t’ont amené à l’ascension du Lhotse.
Je suis née dans la région parisienne (92), et j’ai grandi à Sceaux, où j’ai effectué une partie de ma scolarité. Après des études de biologie marine à Brest, je me suis orientée ensuite vers les sciences sociales (Master en ‘Social Policy’) à Londres, puis en sciences humaines (PhD en sciences religieuses) à Montréal. Ce parcours m’a amenée à travailler dans différents milieux, principalement à l’étranger. J’ai tour à tour été diplomate, humanitaire, chercheure, enseignante à l’université, et aujourd’hui, je suis auteure et conférencière.
Un événement majeur a marqué ce parcours. A 25 ans seulement, alors que j’étais dans le nord de l’Inde, au pied de l’Himalaya, j’ai été victime d’une hémorragie cérébrale. J’ai survécu, et à la suite d’une grosse opération au cerveau, j’ai dû renoncer à certaines de mes passions, telle que la plongée, et les treks en haute altitude.
Surmontant mon handicap, et alors que rien ne me prédisposait à vivre une telle aventure, quinze ans plus tard, j’ai effectué l’ascension d’un 8000, le Lhotse (8,516 m), un rêve que j’avais depuis mon jeune âge et que j’avais littéralement mis de côté, voire étouffé, depuis mon accident cérébral.
Depuis, je me suis installée à Chamonix, et je donne des conférences un peu partout en France et à l’international sur mon ascension du Lhotse. J’ai également publié un livre « Sous l’œil de la Déesse », aux Éditions du Mont-Blanc (Catherine Destivelle), qui relate mon ascension du Lhotse. C’est avant tout une histoire de résilience.
Pourquoi as-tu souhaité raconter ton histoire dans un livre ? Quels messages as-tu voulu transmettre ?
Avant la publication de mon livre « Sous l’œil de la Déesse », j’avais déjà écrit un livre universitaire « When a Goddess Dies » (Oxford University Press à New York). Mais je voulais sortir du champ académique et écrire des livres pour le grand public. Il a fallu l’ascension du Lhotse pour déclencher le processus et oser ! Au retour de l’expédition, je me suis dit, c’est maintenant ou jamais. Écrire un livre sur mon ascension n’était pas planifié, je n’avais d’ailleurs pris aucune note pendant mon périple.
Les messages dans mon livre, il y en a plusieurs, mais si je devais résumer en quelques mots, je dirais « croire en soi, être fidèle à qui l’on est ». Dans mon cas, rien ne me prédestinait à grimper le Lhotse pour plusieurs raisons : mes antécédents médicaux ; le fait que je ne sois pas une himalayiste / alpiniste à la base (je suis partie de quasi zéro) ; les incidents successifs qui ont marqué l’expédition et qui n’ont favorisé en rien l’ascension ; enfin, le fait que je n’ai pas été soutenue en tant que femme (j’étais l’unique femme au sein d’un groupe de 25 à 30 hommes, népalais et occidentaux confondus).
Conférencière (entre autres) tu interviens aujourd’hui auprès d’entreprises. Quelles sont-elles ? Dans quel contexte font-elles appel à toi ? Quels parallèles peut-on faire entre ton ascension et le monde du travail ?
J’interviens régulièrement en tant que conférencière auprès d’entreprises diverses et variées (compagnies d’assurance, laboratoires pharmaceutiques, cabinets d’audit, compagnies de gaz et pétrole, automobile, banques, etc.), en France et à l’international, en français et en anglais (je peux également intervenir en espagnol, mais n’en ai pas encore eu l’occasion).
Mes conférences ont lieu bien souvent dans le cadre de séminaires d’entreprises, et sont bien évidemment adaptées à l’audience (rdv préparatoire avec le client), et durent généralement une heure, puis il y a le temps des questions, et enfin les échanges plus informels.
Lors de mes conférences, j’aborde beaucoup de thématiques propres au monde du travail, telles que la prise de décision, la gestion du risque, la préparation (spécialement mentale, pour casser les croyances limitantes), le syndrome de l’imposteur, l’adaptation au changement rapide, la confrontation à l’inconnu, la gestion du stress, etc. Je parle également d’humilité, d’acceptation de ses limites (pour mieux les dépasser), de la vulnérabilité (pour mieux affronter l’incertitude), du lâcher prise, et bien sûr de la capacité de rebondir en dépit des difficultés. En fonction de l’audience, j’insiste sur certains points en particulier, mais globalement, ce sont des conférences axées essentiellement sur le leadership, la résilience, et le dépassement de soi.
Après tout cela … Quels sont les projets à venir !
Aujourd’hui j’ai le projet de réaliser le « Grand Chelem des Explorateurs » (Explorer’s Grand Slam), soit l’ascension du plus haut sommet de chaque continent (7 summits) et l’atteinte du pôle Nord et du pôle Sud à skis. Mon objectif principal est d’inspirer, plus particulièrement les femmes, à se dépasser, à faire preuve d’audace et oser aller plus haut ! Dans l’histoire, seules quelques femmes dans le monde ont réalisé ce défi.
Le projet a débuté en janvier 2022 avec l’ascension de l’Aconcagua (6,962m), plus haut sommet des Amériques, situé en Argentine, et se poursuit avec l’ascension de l’Everest (8,849m), au printemps 2023. Pour ce projet, je suis soutenue par une association, DareWomen, qui vient d’ailleurs de créer une cagnotte. Toute contribution, aussi minime soit-elle, est bien entendu la bienvenue !
On sent un côté presque viscéral à grimper…
Arrives-tu à expliquer ce besoin d’aventures et de dépassement de soi ? Quel est ton driver ?
J’ai toujours eu ce besoin d’aventures, cette envie de me dépasser. Je pense que c’est, avant tout, une question de tempérament. Et puis mes parents m’ont toujours encouragée à aller de l’avant, à oser. Après, il y a probablement autre chose qui explique ce besoin, quelque chose d’ordre plus irrationnel je dirais. Parfois, je ressens juste une force en moi qui me tire vers le haut, et là, je n’ai plus vraiment le choix, je dois foncer !
Quel conseil donnerais-tu aux personnes qui souhaitent se lancer dans un projet quel qu’il soit, et qui n’osent pas ?
Je leur dirais tout d’abord de commencer petit, d’y aller par étapes, au fur et à mesure. Un peu comme un enfant qui apprend à marcher. Il tombe, il se relève, puis tombe à nouveau et se relève, etc., jusqu’à ce qu’il arrive à avancer. Rien ne sert d’aller trop vite, il faut y aller progressivement, sans se mettre de pression inutile.
La deuxième chose que je leur dirais, c’est de penser à ce qu’elles feraient si elles apprenaient qu’il leur reste peu de temps à vivre… un mois à vivre par exemple, ou une année. Cela donne tout de suite une autre perspective !
Enfin, je leur dirais simplement de s’écouter, et ne pas se laisser trop influencer par leur environnement, qui parfois, peut les freiner dans leur élan. C’est important d’écouter sa petite voix intérieure, et de se faire confiance.
Une anecdote secrète d’aventurière à nous partager ?
J’ai beaucoup d’anecdotes (sourire)… des drôles et des moins drôles, mais toujours très instructives.
Je les partagerais bien volontiers lors d’une conférence !
Retrouvez toutes nos interviews, par ici